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parce qu’elle ne pouvait pas accepter cette idée que le lieutenant avait en dehors d’elle une vingtaine d’amies, multiplicité qui ne laissait pas d’affaiblir l’ardeur avec laquelle ce costaud lui témoignait ses sentiments.

Le lieutenant Lucas entretenait aussi des relations épistolaires très suivies avec des amies absentes dont les photographies ornaient son album. Depuis quelque temps il tendait au fétichisme et collectionnait des reliques. Sa collection se composait de quelques jarretières, de quatre pantalons de dames, richement brodés, de trois chemises entièrement à jour, du plus fin creton de soie, de mouchoirs de batiste, d’un corsage et de plusieurs bas dépareillés.

— Je suis de service aujourd’hui, dit Lucas, et je ne rentrerai que très tard. Gardez bien l’appartement et tâchez de mettre tout en ordre. L’ordonnance dont je me suis débarrassé à cause de sa fainéantise, part aujourd’hui pour le front, attention à vous, hein !

Il donna encore des ordres sur l’entretien du serin et du chat et sortit, non sans ajouter, en tenant la porte, quelques conseils sur l’honnêteté et sur la correction.

Chvéïk fit de son mieux pour remettre l’appartement en bon état. Lorsque son maître rentra après minuit, la nouvelle ordonnance résuma ainsi son travail du jour.

— Je vous déclare avec obéissance, mon lieutenant, que tout est en bon ordre, sauf pour le chat qui a fait un sale coup et a boulotté votre canari.

— Comment ça ? tonna Lucas.

— Je vous déclare avec obéissance, mon lieutenant, que je vais vous l’expliquer en trois mots. Je