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bien cirées, l’uniforme en bon état, tous les boutons bien cousus, et il faut toujours avoir l’air d’un soldat et pas d’un voyou de civil. C’est curieux qu’on n’arrive jamais à avoir une ordonnance qui ait un peu de tenue militaire. Je n’en ai eu qu’un seul qui avait une tournure martiale, mais celui-là m’a volé mon uniforme de parade et l’a vendu dans le quartier juif.

Il se tut un instant. Puis, il se mit de nouveau à expliquer à Chvéïk toutes les tâches qui lui incomberaient, en insistant toujours sur la nécessité d’être un fidèle serviteur et de ne raconter à personne ce qui se passait.

— Je reçois souvent des dames, dit-il, et quelquefois elles passent la nuit ici, quand je ne suis pas de service le lendemain. Dans ce cas, vous nous apporterez notre café au lit, mais seulement quand j’aurai sonné, vous comprenez ?

— Je vous déclare avec obéissance, mon lieutenant, que je comprends très bien, parce que, si j’entrais tout à coup, sans prévenir, ça pourrait être des fois très désagréable pour la dame. Une fois j’ai ramené chez moi une jeune fille et le lendemain, la logeuse nous a apporté notre café juste au moment où on n’était pas très sages. La brave femme a eu peur, elle m’a échaudé le dos avec son café et elle a eu encore le toupet de me dire : « Bonjour, M’sieur le patron ! » C’est pour vous dire mon lieutenant, que je sais parfaitement comment on doit se tenir, quand il y a une dame en visite.

— C’est bien, Chvéïk, pour les dames, il faut toujours être excessivement poli, fit le lieutenant dont l’humeur maussade se dissipait, la conversation roulant sur un sujet qui occupait les loisirs