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bien voulu le croire. Un second coup, l’instituteur a prétendu qu’il cherchait dans le bois un insecte très rare ; et le pauvre type bafouillait tellement qu’il a fini par raconter qu’il était venu poser des collets à lièvres. Le garde lui a fait jurer que c’était la vérité et l’a conduit ensuite à la gendarmerie ; de là, l’instituteur a passé au tribunal, et il a bien failli aller en prison. Et pourtant, c’était bien simple : s’il avait dit la vérité, il n’aurait eu qu’un peu de crin coupé, mélangé avec du sel. Moi, je suis d’avis, que dans tous les cas on a raison d’avouer ; mieux vaut toujours être franc ; et quand il m’arrive de faire quelque chose qui ne convient pas, j’aime mieux me présenter et dire : « Je vous déclare avec obéissance que j’ai fait ceci et cela ». Quant à l’honnêteté, c’est aussi une très belle chose, avec elle, on est toujours sûr d’aller loin. Prenons par exemple les courses à pied. Celui qui triche, est tout de suite disqualifié. C’est ce qui est arrivé justement à mon cousin. Un homme honnête est estimé de tout le monde, on le respecte partout, il passe son temps à être content de lui-même et il se sent renaître tous les jours quand il se met au lit et qu’il peut se dire : « Encore une journée où j’ai été honnête. »

Pour écouter Chvéïk, son nouveau maître s’était assis et, le discours se prolongeant, il regardait les chaussures de son tampon.

— Mon Dieu, pensait-il, tout ce qu’il dit, c’est des boniments idiots, mais moi-même, est-ce que je ne dis pas souvent des bêtises du même genre ? Il n’y a que la façon de les dire qui varie.

Pour se donner une contenance et préserver son autorité, il dit, quand Chvéïk eut fini :

— Chez moi, il faut avoir les chaussures toujours