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pas votre bouton, et c’est le commencement du désordre. Demain, vous trouverez déjà incommode de démonter votre fusil pour le nettoyer, vous oublierez votre baïonnette chez le bistro, et à la fin, vous vous endormirez étant en faction et de tout cela le germe aura été ce malheureux bouton. Voilà, mon garçon, pourquoi je vous punis, c’est dans votre intérêt, pour vous éviter la punition plus grave que vous ne tarderiez pas à récolter en continuant à négliger vos devoirs. Vous me ferez cinq jours et je vous souhaite de profiter de ces loisirs au pain sec et à l’eau pour réfléchir un brin, pour comprendre que la punition n’est nullement une vengeance de notre part, mais un simple moyen d’éducation, employé dans le seul but de faire du soldat puni un meilleur soldat.

Depuis longtemps, déjà, le lieutenant Lucas aurait dû passer capitaine ; mais sa prudence concernant la nationalité tchèque ne lui servit de rien : son avancement s’ajournait à cause de la franchise dont il ne se départait jamais dans ses relations avec ses supérieurs, car il avait la flatterie en horreur.

Son caractère avait gardé quelque chose de celui du paysan tchèque du Midi de la Bohême : il était né dans un village de cette contrée pleine de sombres forêts et d’étangs glauques.

S’il était juste envers les soldats, en général, il détestait les ordonnances, parce qu’il avait toujours eu le malheur de tomber sur des tampons ignobles.

Il les giflait et essayait de les redresser par des remontrances continuelles et en leur donnant des exemples d’une conduite irréprochable ; mais ses