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— Je suis un lâche, un infâme !

Et il s’endormit sur-le-champ.

Le lendemain, ayant soin d’éviter le regard de Chvéïk, il sortit très matin et ne rentra que tard dans la nuit, flanqué d’un nabot, sa nouvelle ordonnance.

— Mettez-le au Courant du service, dit-il, fuyant toujours le regard de Chvéïk, et apprenez-lui bien à faire les grogs… Demain, vous irez vous annoncer au lieutenant Lucas…

Chvéïk et son successeur passèrent agréablement la nuit à se chauffer des grogs. Au réveil, le nabot, qui se tenait à peine sur ses jambes, éprouva le besoin de chanter un original pot-pourri d’airs populaires.

— Pour toi, je peux être tranquille, c’est réglé, déclara Chvéïk à son élève ; avec des dispositions comme tu en as, tu peux être sûr de faire l’affaire de monsieur l’aumônier.

Le matin même le brave soldat Chvéïk montra pour la première fois sa face pleine de franchise et de probité à son nouveau maître, le lieutenant Lucas.

— Je vous déclare avec obéissance, mon lieutenant, annonça-t-il, que c’est moi le Chvéïk que monsieur l’aumônier Katz a perdu aux cartes.


2.

Les officiers emploient des ordonnances depuis l’âge le plus reculé. Il est probable qu’Alexandre le Grand avait déjà son tampon. Ce qui est certain, c’est qu’à l’époque féodale ce rôle était tenu