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il lui était impossible, même en le faisant exprès, de dépasser le vingt et un. En voyant ça, ils devenaient tous idiots et faute de pognon, ils se sont mis d’accord pour signer des bons. Ça a duré plusieurs heures et les mille balles s’accumulaient toujours devant Voyvoda. Le patron-ramoneur devait déjà un million et demi, le charbonnier du coin, près d’un million, le concierge du Café du Siècle y était pour 800.000, un carabin pour deux millions. Rien que dans la cagnotte, il y avait 300.000 balles, en bons, bien entendu. Le vieux faisait des efforts désespérés pour perdre. À chaque instant il s’en allait quelque part et laissait sa place à un autre ; mais quand il revenait on lui annonçait qu’il avait encore gagné. Ils ont pris un jeu de cartes tout neuf, mais c’était toujours la même chose. Quand, par exemple, le vieux Voyvoda s’arrêtait à quinze, l’autre n’avait que quatorze. Tout le monde le regardait de travers et celui qui grognait le plus, c’était un paveur qui n’avait risqué que huit couronnes. Il disait qu’un type comme le vieux Voyvoda, la terre ne devrait pas le porter, qu’on devrait l’éventrer à coups de pied, le foutre dehors et le noyer comme un chien. Vous n’avez aucune idée de l’état où était le vieux Voyvoda. Enfin, il lui est venu une idée. « Je vais sortir, qu’il dit au ramoneur, tenez mes cartes. » Et sans chapeau, il court dans la rue Myslikova pour trouver les agents. Par hasard, il est tombé le nez dessus et leur a tout de suite dit que chez un tel bistro on jouait à un jeu de hasard. Les agents lui ont dit d’aller devant, qu’ils le suivaient. À peine rentré dans la salle, on lui apprenait que le carabin avait perdu entre temps plus de deux millions, et le concierge plus de trois ; que dans la