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donner l’Extrême-Onction au premier venu atteint de choléra.

— C’était son devoir, cher monsieur, fit le feldkurat ; demain, moi aussi, je vais administrer.

— Et dans une baraque à choléra la même chose, ajouta Chvéïk. Vous n’avez qu’à nous accompagner, et vous verrez ce qu’on appelle des gens qui se sacrifient.

— Monsieur l’aumônier, insista l’autre, croyez-le, je suis dans une situation plus que précaire. On dirait vraiment que cette guerre est faite exprès pour supprimer de la face du monde tous mes débiteurs.

— Quand vous serez soldat – vous savez qu’on prend maintenant les civils – et quand vous irez au front, nous dirons avec M. l’aumônier une messe pour que le bon Dieu daigne se souvenir de vous et régler votre compte avec le premier shrapnel parti des lignes ennemies.

— Monsieur l’aumônier, c’est très sérieux, dit l’entêté, je vous prierai d’enjoindre à votre ordonnance de ne pas se mêler de nos affaires ; je voudrais bien que nous puissions nous entendre.

— Excusez mon indiscrétion, monsieur l’aumônier, déclara Chvéïk, mais il faudrait en ce cas me donner alors l’ordre formel de ne pas me mêler de vos affaires, sans cela, je ne cesserai pas de défendre vos intérêts, comme doit le faire, du reste, tout soldat qui se respecte. Ce monsieur à raison de vouloir sortir d’ici de sa propre volonté. J’aime autant ça, parce que dans ces choses-là, j’agis toujours en homme bien élevé.

— Mon petit Chvéïk, dit le feldkurat feignant de ne pas s’apercevoir de la présence de son créancier, ça commence à m’ennuyer ; j’avais cru que cet