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de la sale habitude de cracher dans un appartement qui n’est pas à vous. Vous croyez peut-être que tout est permis en un temps de guerre comme celui-ci ? Vous allez me faire le plaisir de vous tenir comme un homme bien élevé et pas comme un voyou. Il s’agit d’être poli, de parler comme il faut et de ne pas vous conduire comme un saligaud. Est-ce compris, espèce de tourte civile ?

Le monsieur incorrect se leva, agité d’un tremblement nerveux, et cria :

— Comment osez-vous me dire ça, vous, est-ce que je ne suis pas un homme comme il faut ?… Et qu’est-ce que je suis alors ?

— Un goret mal éduqué, répondit Chvéïk en le regardant bien ; vous crachez par terre comme si vous vous croyiez dans le tram, dans le train ou dans un autre endroit public. Je me suis toujours demandé pourquoi on y mettait des écriteaux « Défense de cracher ». Je le sais maintenant, c’est à votre intention, vous devez être un frère bien connu.

Tour à tour blême et congestionné, le visiteur se répandit en une avalanche d’invectives contre Chvéïk et le feldkurat.

— Avez-vous tout dégoisé ? questionna tranquillement Chvéïk lorsque le visiteur indécent déclara qu’ils « étaient des fripouilles tous les deux, tel maître, tel valet » ou bien, avez-vous encore quelque chose à dire avant de dégringoler l’escalier ?

Comme son adversaire se taisait pour reprendre haleine et aucune insulte ne lui venant plus à l’esprit, Chvéïk prit son silence pour une invitation à passer aux actes.