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de Vlachime, il y avait dans le temps un curé doyen qui, après que sa vieille gouvernante a eu décampé en emportant leur gosse et son argent, a pris seulement une femme de ménage. Alors, ce doyen, dans ses vieux jours, s’est mis tout d’un coup à étudier les œuvres de saint Augustin et il y a lu comme ça que celui qui croyait à l’existence des antipodes méritait d’être damné. Comme ça, il fait venir sa femme de ménage et lui dit : « Écoutez-moi bien, vous m’avez raconté un jour que votre fils était mécanicien et qu’il était parti pour l’Australie. C’est donc qu’il se trouverait maintenant aux antipodes, et saint Augustin dit que celui qui croit à l’existence des antipodes mérite d’être damné. »

— Mais, mon gracieux maître, que lui répond la femme de ménage, mon fils m’envoie de là-bas des lettres et de l’argent. – Ce sont des pièges du démon ! lui répond le doyen ; « d’après saint Augustin, il n’y a pas du tout d’Australie, c’est l’Antéchrist qui cherche à vous égarer par ses tentations ». Et le dimanche, du haut de sa chaire, le doyen a maudit le fils et la mère en criant à perdre haleine que l’Australie n’existait pas. On l’a conduit directement de l’église dans une maison de fous. Je ne dis pas qu’il n’y en a pas d’autres qui devraient y être, il y en a pas mal dans le même genre qui courent les rues. Dans le couvent des Ursulines ils gardent un flacon du lait de la Sainte Vierge du temps qu’elle allaitait le petit Jésus, et dans un orphelinat près de Benechof on avait fait venir une fois de l’eau de Lourdes, mais les orphelins à qui on en avait fait boire ont attrapé une diarrhée qu’on n’avait jamais rien vu de pareil.

À ce moment, l’apôtre tourna de l’œil et ne revint