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ayant fort diverti les soldats qui y assistaient.

Un incident se produisit au moment où le feldkurat et Chvéïk montant dans le tramway pour retourner chez eux, le conducteur leur refusa d’accueillir dans la voiture leur autel pliant.

— Rouspète pas, ou je t’abîme la figure avec ce malheureux innocent de saint ! dit Chvéïk en brandissant l’autel plié sous le nez du conducteur.

Arrivés enfin à la maison, ils constatèrent qu’ils avaient perdu le tabernacle.

— Ça n’a aucune importance, déclara Chvéïk ; les premiers chrétiens disaient bien leurs messes sans se servir du tabernacle. Si nous déclarions la perte à la police, quelqu’un d’honnête qui l’aura certainement retrouvé viendra demander une récompense. Un soldat de mon régiment de Boudéïovice, une tourte comme on n’en fait plus, avait trouvé une fois six couronnes dans la rue, et il est allé les remettre au commissariat de police. Les journaux en ont parlé, bien entendu, et cet imbécile d’honnête homme a été ridiculisé à jamais. Personne ne voulait plus le connaître ; tout le monde lui disait : « Il faut être idiot pour faire une stupidité comme ça, c’est honteux ! si tu as un tout petit peu d’honneur dans le corps, tu passeras ta vie à t’en repentir ». Il courtisait une boniche qui a rompu avec lui aussitôt qu’elle a su sa bêtise. Quand il est revenu en permission dans son patelin, ses camarades l’ont mis à la porte de chez le bistro. Il a commencé à dépérir, sa gaffe ne lui sortait pas de la tête, et à la fin du compte il s’est jeté sous le train. Il y avait aussi dans notre rue un tailleur qui a trouvé un jour une bague en or. On a eu beau lui conseiller de prendre