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À cette occasion, on avait convoqué, par mégarde ou par précaution, un second feldkurat, ancien professeur de religion dans un lycée et homme fort dévot, qui ne cacha pas son étonnement lorsque son collègue l’engagea à boire un coup de cognac à même la gourde que Chvéïk emportait toujours soigneusement remplie, dans chacune de leurs missions.

— C’est une marque excellente, avait dit le maître de Chvéïk à l’aumônier ahuri ; buvez-en une gorgée et retournez à vos affaires, je m’arrangerai sans vous ; j’ai rudement besoin de prendre un peu d’air frais, parce que j’ai mal aux cheveux.

Le pieux feldkurat s’en alla en hochant la tête et Katz remplit brillamment sa tâche comme toujours.

Pour la transsubstantiation, il se servit cette fois-ci, de Weinspritz, et le sermon fut un peu plus long, car un mot sur trois était suivi par un et cætera et un « évidemment ».

— Soldats, dit-il, vous partez aujourd’hui pour le front, et cætera. Élevez vos cœurs et cætera vers Dieu, évidemment. Vous ne savez évidemment pas ce que vous allez devenir, et cætera.

Le sermon continuait sur ce ton. Le courant d’et cætera et d’« évidemment » s’arrêtait parfois pour laisser passer des « nom de Dieu » et de tous les saints.

Dans son élan oratoire, le feldkurat ne manqua pas de conférer l’auréole au prince Eugène, devenu le saint patron des sapeurs, toujours prêt à leur venir en aide, sur le champ de bataille, pour la construction d’un ponton dangereux.

La messe fut cependant achevée sans autre scandale,