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somme pour payer le fourrage, que je l’ai bue. Et si Ficher ne marche pas, vous irez mettre le piano au Mont-de-Piété, je m’en fous. Pour les officiers, je vous écrirai un mot. Ne vous laissez pas faire. Dites bien à tous ces messieurs que j’ai un terrible besoin d’argent, que je suis resté sans un sou. Inventez tout ce que vous voulez, mais ne revenez pas les mains vides. Vous demanderez aussi au capitaine Chnable de vous donner l’adresse de son fournisseur de brou de noix.

Chvéïk remplit brillamment sa mission. Son air ingénu et son regard franc lui conquirent la confiance générale ; on le crut sur parole.

Il avait jugé opportun de raconter aux capitaines Chnable et Ficher et au lieutenant Malher que son maître devait payer, non pas le fourrage, mais à sa maîtresse délaissée une pension alimentaire. Il n’essuya donc aucun refus.

Quand, après cette expédition glorieusement terminée, Chvéïk exhiba les trois billets de cent couronnes au feldkurat, celui-ci – qui s’était lavé et avait fait toilette – eut peine à en croire ses yeux.

— Je les ai ramassés tous les trois à la fois, expliqua Chvéïk ; comme ça nous n’aurons plus besoin de chercher de l’argent demain ou après-demain. Ça a marché tout seul, il n’y a eu un peu de tirage qu’avec le capitaine Chnable, devant qui j’ai dû me mettre à genoux. Ça doit être un sale type, celui-là. Mais, quand je lui ai dit que nous devions payer une pension…

— Une pension ? questionna le feldkurat tout inquiet.

— Mais oui, une pension, monsieur l’aumônier, pour consoler votre demoiselle. Vous m’aviez dit