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et si on ne pourrait pas s’arranger pour me le passer.

Le juge commença à chercher dans ses paperasses le dossier Chvéïk, mais sans succès.

— Je dois l’avoir passé au capitaine Linhart, dit-il après une longue recherche infructueuse ; je me demande comment tous ces documents peuvent disparaître comme ça. Linhart doit les avoir, attendez que je lui donne un coup de téléphone.

— Allô, mon capitaine, le lieutenant-auditeur Bernis à l’appareil. Je vous prierais de me dire si vous n’avez pas dans votre bureau des documents concernant un certain Chvéïk… Comment, c’est moi qui dois les avoir ?… Ça m’étonnerait beaucoup… Et c’est à moi-même que vous les avez transmis ? Je n’en reviens pas… Cet homme est placé au seize, mon capitaine… En effet, le seize est de mon ressort, je ne l’ignore pas, mon capitaine, mais je croyais que les documents traînaient quelque part chez vous… Comment, vous m’interdisez de vous parler sur ce ton ? Vous dites que chez vous il ne traîne rien du tout ?… Allô, Allô…

Bernis raccrocha le récepteur et, s’étant rassis derrière son bureau, se livra à une charge à fond contre le désordre qui sévissait dans les affaires en instruction. Entre lui et le capitaine Linhart régnait depuis longtemps une hostilité à laquelle ni l’un ni l’autre ne cherchait à mettre fin. Si, par hasard, un document quelconque qui devait être remis à Linhart tombait entre les mains de Bernis, celui-ci le « classait » avec tant de soin que personne ne le revoyait jamais. Or, le capitaine Linhart usait de réciprocité pour les documents destinés à être étudiés par Bernis. Par exemple, les annexes qui devaient étayer une accusation disparaissaient