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temps après, le gardien en chef revint et, sans autre forme de procès, tira Chvéïk du groupe des caleçons pour l’emmener dans la sacristie.

En y rentrant, Chvéïk trouva le feldkurat commodément assis sur la table et roulant une cigarette.

— Vous voilà, vous, dit le feldkurat. Réflexion faite, je crois que vous n’êtes qu’un truqueur, tu m’entends, filou ! C’est la première fois qu’on chiale à mon sermon.

Il sauta de la table et, secouant Chvéïk par les épaules, lui cria sous le mélancolique portrait de François de Sales :

— Avoue, voyou, que tu as pleuré par blague ! Tu ne vas pas prétendre que tu as chialé sérieusement ?

Du haut de son cadre François de Sales attachait sur Chvéïk son regard énigmatique. En face du saint était suspendu un autre tableau représentant un martyr dont les soldats romains étaient en train de scier les fesses. Le visage de leur victime ne reflétait ni souffrance, ni la joie du sacrifice : il n’était pas illuminé non plus de la béatitude des martyrs. On n’y lisait qu’un ahurissement qui semblait dire : Comment est-ce que je me trouve ici, messieurs, et qu’est-ce que vous voulez faire de moi ?

— Je vous déclare avec obéissance, monsieur l’aumônier, dit Chvéïk en jouant son va-tout, que je confesse à Dieu tout-puissant et à vous, mon père, qui êtes à la place de Dieu, que j’ai pleuré sérieusement par blague. Je me suis dit que vous aviez besoin d’un pécheur repenti pour votre sermon. Et alors j’ai voulu vous faire vraiment