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orages de la vie, vos souffrances dans cette vallée de larmes, ne seront pas effacés par la faveur du ciel, vous pouvez en être sûrs, classe de fourneaux, la bonté de Dieu a ses bornes, et toi, veau qui renifles là-bas au fond, veux-tu bien finir, ou je vais te flanquer à la boîte jusqu’à ce que tu sois tout bleu ! Et vous, là-bas, vous croyez-vous chez un cochon de bistro ? Dieu est plein de miséricorde, mais la faveur du ciel est réservée aux gens comme il faut et n’est pas pour les rebuts de la société humaine qui n’observent pas ses lois et ne connaissent pas le premier mot du dienstreglement. Voilà ce que je tenais à vous dire. Vous ne savez pas ce que c’est que de prier, et vous prenez la chapelle pour un beuglant ou un cinéma, où on va rigoler. Des idées comme ça, je vous les ferai passer, vous verrez si je suis ici rien que pour vous faire rire et vous donner la joie de vivre. Je vous ficherai tous en cellule, chacun tout seul et ça ne va pas traîner, je vous en fiche mon billet, gredins. Je perds mon temps avec vous, et je vois que tout ça est peine perdue ; un maréchal ou un archevêque ne gagnerait rien avec vous, vous resterez des sales types pour qui le bon Dieu n’existe pas. Et pourtant, vous vous rappellerez un jour votre aumônier qui ne pensait qu’à votre salut.

Du groupe de vingt caleçons monta un sanglot : Chvéïk se mettait bruyamment à pleurer.

Le feldkurat le regarda. Chvéïk s’essuyait les yeux de ses poings, ce qui réjouissait fort ses camarades.

Le feldkurat reprenait son sermon, enrichi d’un motif nouveau :

— Cet homme est digne de servir d’exemple à tout