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la maison de notre Seigneur. Tenez-vous le pour dit, mes petits agneaux. Bon, où en étions-nous encore ? Ja ueber den Seelenfrieden, sehr gut[1]. Enfoncez-vous bien dans la tête, abrutis, que vous êtes des membres de la société humaine et que vous avez le devoir de regarder au delà du sombre horizon, dans l’espace lointain, et de vous rappeler que tout passe ici-bas, sauf Dieu qui est éternel. Sehr gut, nicht wahr, meine Herren[2]. Je sais que je devrais prier jour et nuit pour vous le Dieu de bonté pour qu’il fasse pleuvoir, espèces d’andouilles, sa miséricorde sur vos cœurs endurcis et avec sa sainte grâce vous nettoie de vos péchés et vous adopte à jamais pour siens, gredins, et vous chérisse jusqu’à la fin du monde. Allons donc ! Vous vous êtes trompés un rude coup. Ne comptez pas sur moi pour vous faire entrer au paradis, je ne suis pas ici pour cela… Le feldkurat hoqueta. – Non, je ne suis pas ici pour ça, répéta-t-il, je ne veux rien faire pour vous, je ne suis pas gourde à ce point-là, je sais que vous êtes des saletés indécrottables. Dans sa haute sagesse, Dieu ne veut pas connaître même votre passage sur cette terre, le souffle de l’amour divin n’amollira jamais vos âmes, et, d’ailleurs, vous n’en avez pas. Le bon Dieu n’est pas là pour s’occuper de mecs comme vous ! Est-ce que vous m’écoutez au moins, vous, les types en caleçon ?

Les vingt caleçons levèrent les yeux vers la chaire et répondirent comme un seul homme :

— Nous vous déclarons avec obéissance, monsieur l’aumônier, que nous avons bien écouté.

— Il ne s’agit pas d’écouter seulement, dit le feldkurat en poursuivant son sermon. Les sinistres

  1. Oui, au sujet de la paix de l’âme, très bien !
  2. Très bien, n’est-ce pas, messieurs ?