Page:Harvey - Marcel Faure, roman, 1922.djvu/70

Cette page a été validée par deux contributeurs.

province de Québec, nous avons mené, auprès d’elles, une propagande d’intellectualité. Tout à l’heure, nous visiterons ma ville : tu y verras les monuments que j’ai élevés à l’intelligence. Dans la plupart des grands centres, la masse est formée d’inconscients à échine servile ; ici, nous avons un faisceau de cerveaux lumineux.

« Surtout, nous préparons l’avenir ! Quand je parle d’avenir, les vers du poète me viennent toujours à la mémoire :


Non ! Si puissant qu’on soit, qu’on rie ou que l’on pleure,
Nul ne te fait parler, nul ne peut avant l’heure
Ouvrir ta froide main,
Ô fantôme muet ! Ô notre ombre ! Ô notre hôte,
Spectre toujours masqué qui nous suit côte à côte
Et qu’on nomme demain !…
L’homme aujourd’hui sème la cause,
Demain Dieu fait mûrir l’effet.


« Hugo se trompait. Quand un peuple sait organiser le présent, il est certain de son avenir, et s’il n’a mis dans ses entrailles que des germes de vie, aucune puissance n’y peut faire mûrir la mort, car, Dieu qui fait blondir l’effet, est avant tout le semeur de la vie. L’avenir n’est ni un fantôme, ni une ombre, ni un spectre : il est la réalité palpable, l’être que nous domptons quand nous le voulons : il est tout entier dans les jeunes mariés qui entrent dans le délire de leurs nuits de noces et qui vont faire les