Page:Harvey - Marcel Faure, roman, 1922.djvu/196

Cette page a été validée par deux contributeurs.
184
MARCEL FAURE

sens, il nous obsède, il imagine, il pense, il veut pour nous. Alors il arrive — pour qui n’est pas habitué aux crises sentimentales — qu’on voit faux et que l’œil confond les couleurs à la manière des daltonistes. Si, dans ces moments décisifs, on a la main à la locomotive qui conduit vers un idéal autrefois voulu, les signaux de la raison, loin de guider, mènent vers des buts dangereux, vers des sinistres. C’est ce daltonisme de la passion qui avait conduit Marcel au reniement de Valmont ; mais, après son renoncement, il lui restait du moins la foi en la femme. Le document volé chassait son cœur de ce dernier refuge. Plus rien ! Le vide partout !

Pour la première fois de sa vie, il devint amer et haineux. Tout son être rugissait contre la femme. « Ce sont de petites brutes égoïstes, menteuses et dissolues, se disait-il. Elles sont entrées trop loin dans la vie de l’homme, elles ont pris toute son âme dans leurs fines mains qui broient et qui déchirent ; elles ne se liment les ongles que pour mieux fouiller dans votre poitrine. Pourquoi ne sont-elles pas restées les esclaves qu’elles furent dans l’antiquité ? Elles seraient ce qu’elles doivent être : des femelles. Elles contaminent notre vie sociale ; nos institutions financières, industriel-