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fonte rugueuse. La jalousie le suffoquait comme du vomissement. Il maudissait le capitaliste.

« Avait-il tort ? Pas tout à fait. Tu ne comprends peut-être pas toute la différence qu’il y a entre le capitaliste et le patron. Le premier prépare la destruction du capital et le second le crée. Je m’explique : Tu as remarqué que la plupart des grandes entreprises commerciales et industrielles ont eu des débuts paisibles : il y existe un esprit de famille, un foyer chaud autour duquel le petit employé aime à s’attarder et à se sentir vivre. La révolte y est inconnue. D’où vient cette paix ? De ce que le patron est là, en chair et en os, travaillant comme les autres, souriant aux humbles, ses collaborateurs. Ancien ouvrier lui-même, souvent, il a connu les aventures et la férule des incompétents. Il est indulgent et compatissant pour ceux qui, hier encore, étaient ses compagnons.

« Le patron meurt au moment où il commence à devenir riche. Ses fils ne le valent pas. Le surmenage cérébral est contraire à la génération des mâles vigoureux. Le génie, sauf exception, ne se transmet pas, car celui dont l’esprit a beaucoup travaillé, ayant épuisé ses réserves d’énergie les plus précieuses,