carrière. Je consultai là-dessus plus d’un citoyen. Lucien, voyant mon embarras, me présenta à un vieux professeur d’université. Séraphin Delorme.
— Tâche d’obtenir son amitié, m’avait-il conseillé, car il a de l’influence dans les cercles universitaires. Tu pourrais aisément passer ton doctorat soit en économie politique, soit en littérature.
Le ménage Delorme vivait rue Saint-Louis, dans une maison qui datait de plus d’un siècle et rappelait, comme un vieil album, l’ancienne bourgeoisie française. Avec son toit en pente, hérissé de deux larges cheminées, ses lucarnes étroites, ses fenêtres à carreaux et ses lourdes portes de chêne, elle plaisait aux touristes dégoûtés des bungalows américains. On aimait ces lignes sobres et pures, qui se retrouvent encore en plusieurs endroits de la ville fortifiée et qui en font le charme désuet, le caractère.
Ma première visite à ces vieux époux fut courte, d’une cordialité conventionnelle. Le hasard me mit de nouveau en leur présence le lendemain, dans la rue, près de la porte Saint-Louis. Ils m’invitèrent à marcher avec eux. Par ce rayonnant matin d’été, on déambula lentement le long des parterres fleuris de l’hôtel du Gouvernement, dont la tour baignait dans des flots de soleil. Les monuments de bronze brillaient d’un vif éclat : l’historien Garneau, dans une pose ridicule de commis aux recettes ; Mercier, avec son geste faux et grandiloquent ; La Vérendrye en un sale accoutrement,