Page:Harvey - Les demi-civilisés, 1934.djvu/208

Cette page a été validée par deux contributeurs.
204
les demi-civilisés

la peste depuis l’incident qui avait apparemment provoqué ma rupture avec Dorothée, cet homme que j’aurais voulu démolir à coups de poing lors de notre dernière rencontre, il y a longtemps, ose m’annoncer tranquillement que c’est lui qui est à l’autre bout du fil ?

— Que puis-je faire pour vous ? lui répondis-je sèchement.

— Ne soyez pas surpris. J’ai une étrange demande à vous faire. Vous serait-il possible de passer chez moi, tout de suite ?

— Étrange en effet. Il me semble que ce serait à vous de venir.

— Je le sais. Mais il faut que je reste chez moi. Vous comprendrez plus tard. Je viens de prendre une grave décision. Avant de partir… pour voyage, je vous dois une confidence. Il s’agit du bonheur de Dorothée.

Il n’y avait plus à hésiter. Je me rendis chez Bouvier, avenue Sainte-Geneviève. Il habitait une vaste maison de pierre comme on en bâtissait beaucoup au milieu du siècle dernier. On y entrait de plain pied dans un large passage, face à un somptueux escalier en noyer noir. À gauche, un salon où des meubles Louis XV voisinaient avec du moderne. Mélange peu harmonieux, mais non sans luxe. Aux murs, des tableaux de nus, rien que des nus.

C’est dans cette pièce qu’on m’introduisit. À peine y étais-je qu’une odeur âcre, mêlée à un parfum violent,