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les demi-civilisés

— « Qui, « ils » ? Vous ne traiterez qu’avec un seul, le chef. Vous discuterez entre quatre murs. Ce n’est pas l’homme que vous achèterez, c’est la revue. Oui, ne vous étonnez pas : nous avons décidé d’en faire l’acquisition pour la bonne cause »…

Le dialogue se poursuivit quelque temps. Il y fut question de dollars — je n’ai pas saisi le chiffre ―, de doctrines, de péril national, que sais-je encore. À la fin, j’ai compris que mon père cédait et qu’il devait vous voir demain matin. Avant de consentir, il posa cette question au personnage :

— « Je doute fort que ces jeunes acceptent une somme d’argent en échange de l’abandon d’un travail quotidien.

— « J’y ai pensé. Tous les rédacteurs du « Vingtième Siècle » resteront à leur poste.

— « Comment pourront-ils contredire demain, sous leur signature, ce qu’ils écrivent aujourd’hui ?

— « C’est un phénomène qui se voit souvent dans le journalisme. Il ne faut pas y attacher d’importance. Vous ne sauriez croire combien le grand public oublie vite. J’ai même pensé qu’il nous serait facile de satisfaire leur esprit critique en leur offrant des sujets assez risqués, des sujets de la période transitoire. Je leur permettrai volontiers, par exemple, de s’attaquer, même violemment, à l’insuffisance de l’enseignement, du personnel enseignant et des programmes de nos institutions. Quelqu’un pourra même les devancer dans cette