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les demi-civilisés

de Maryse. Le « Vingtième Siècle » lança l’édition par un article qui donna le ton à toute la presse et à tous les critiques. Les moutons de Panurge, quoi ! Le succès de publicité fut complet.

Les commentaires « superlatifs » des journaux influencèrent même le monde officiel à un degré tel que le nouvel auteur obtint une bourse qui lui permettait d’aller parfaire son instruction à l’étranger.

À partir de ce moment, Maryse s’intéressa beaucoup moins à l’homme à qui elle devait tout et qui l’avait tirée de son néant. Elle me tourna le dos. Comme elle savait la façon de faire mouvoir les pantins, elle en fit marcher plus d’un après moi. Ensuite, elle passa aux États-Unis. Elle aurait pu écrire, comme Kathleen à Pinon : « La comédie est finie. Tu n’es qu’un imbécile. »

Une fureur froide s’empara de moi, la fureur de la dupe qui se sait dupée. Quand Dorothée m’avait donné congé, j’en avais conçu une douleur dont j’avais cru mourir. Cette fois, c’était mon orgueil qui rugissait. J’en voulus à toutes les femmes. J’eus même la présomption de croire que je me vengerais en me passant d’elles.

Combien la jeunesse se fait d’illusions ! Quelques semaines plus tard, le pardon était rentré dans mon cœur. Je sentais la vie qui renaissait, souriait et m’invitait à l’éternelle fête. Un de ces matins-là, à mon lever, on m’apportait une gerbe de fleurs : des roses, des œillets,