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les demi-civilisés

dois ignorer coûte que coûte, me forcent à te prier de ne plus me revoir.

Ne cherche pas à savoir. Aucune explication n’est possible entre nous. Il s’agit d’un secret que je ne livrerais pas même au prix de ma vie.

Veuille croire que tu n’y es pour rien et que je t’aime plus que tout au monde. Je n’en aimerai jamais un autre. Puissé-je un jour t’en donner la preuve.

Pauvre cher Max… Je viens d’éclater en sanglots. Je t’adore, mais ne viens plus ! Adieu !


Ta Dorothée.


Quel coup de poignard ! Tout d’abord, dans mon cœur, de l’hébétement et de la stupeur. Aucune réaction violente, mais un silence de fin de tragédie. Combien dura cette prostration ? Dix, vingt minutes ? je ne sais. Je croyais rêver. Tournant et retournant entre mes doigts cette lettre maudite, qui avait l’air d’un décret du destin, je me demandais quand viendrait le réveil.

Il fallut bien me rendre à la réalité, hélas ! Mais, l’instant d’après, je me reprenais à douter et à me demander si je n’étais pas le jouet d’une plaisanterie macabre. J’eus l’idée de téléphoner, puis je me ravisai, me disant qu’on ne règle pas par téléphone des questions comme celle-là. Il vaut mieux écrire, me disais-je. Je