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dans son entier : les événements et la vie se chargent de modifier tous les plans. On construit rarement une maison sans en altérer maints détails de l’idée première. Combien plus difficile est d’arranger longtemps d’avance la maison d’une nation ou même d’un univers. L’important est que des milliers de cœurs et de cerveaux se soient imprégnés de la volonté de réforme des conditions sociales et économiques dans les cadres du droit et du bonheur de l’individu dressé contre les empiétements de l’État.

On peut donc espérer que, de cette crise de croissance prolongée, dont l’humanité souffre depuis trente ans, il résultera un progrès sensible. Toutefois, en admettant la nécessité du changement, je puis affirmer sans crainte que, depuis un siècle, ce sont les démocraties où fleurissent l’initiative individuelle et la libre entreprise qui ont évolué le plus rapidement, qui ont le plus changé. Grâce à la souplesse de leurs institutions, elles ont pratiqué une sorte de révolution quotidienne.

Le mensonge de la propagande contemporaine, c’est d’avoir créé des épouvantails avec les mots « capitalisme » et « trusts » et d’avoir affirmé que, sous des puissances d’argent, aucun changement favorable aux droits populaires n’est possible.

La réalité, c’est que, sous les régimes du capital individuel, surtout en Amérique, les individus jouissent non seulement d’une plus grande somme de liberté, mais aussi de changements sociaux plus réels et plus avantageux pour chacun. Par exemple, nous n’avions nullement besoin des leçons de Moscou pour fonder des syndicats ouvriers, instituer des allocations familiales et des pensions de vieillesse, fixer la durée de la semaine de travail et le salaire minimum, accorder les indemnités aux victimes des accidents du travail et les compensations de l’assurance-chômage, donner l’instruction gratuite et obligatoire et passer, d’une année à l’autre, une foule de mesures de protection économique et sociale.

C’est dire que la révolution sociale, même en pays capitaliste, s’accomplit graduellement et pacifiquement, au fur

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