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qu’il est produit par les esprits et introduisent partout les esprits comme agents universels. Ils font comme les mauvais poètes qui, pour le dénouement et la catastrophe finale de leurs pièces, font venir en scène le Deus ex machinâ.

Fernel avec d’autres auteurs suppose des esprits aériens et des substances invisibles. Il prouve que les esprits animaux, qu’Érasistrate admet dans les artères, existent dans le cerveau, car il y a des espaces cellulaires dans le cerveau qui pendant la vie doivent être remplis par les esprits, puisque le vide n’existe pas. Cependant toute l’école des médecins établit qu’il existe trois espèces d’esprits, naturels pour les veines, vitaux pour les artères, animaux pour les nerfs ; d’où les médecins admettent avec Galien que tantôt les parties du cerveau qu’ne peuvent agir seules agissent simultanément avec l’essence, c’est-à-dire l’esprit, tantôt hors de l’essence. Bien plus, ils semblent, outre l’action de ces trois ordres d’esprits, en admettre d’autres qui viennent ajouter leur action. Quant à nous, malgré nos dissections et nos observations, nous n’avons rencontré ces esprits ni dans les veines, ni dans les artères, ni dans aucune autre partie. Les uns disent que ces esprits sont corporels, les autres non corporels. Les premiers soutiennent tantôt que le sang ou les parties les plus subtiles du sang sont une partie de l’âme, tantôt qu’elles sont contenues dans le sang, comme la flamme dans la lumière, et qu’elles vivent par l’agitation continuelle du sang, tantôt qu’elles en sont bien distinctes. Les autres affirment que les esprits n’ont pas de siège spécial ; mais, partout où il y a action, ils voient des esprits, digestifs, chylificateurs, procréateurs : en un mot, il y a pour eux autant d’esprits que de fonctions et d’organes.