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Pour le pain, aucune difficulté : un pour deux étant donné, on se le partageait immédiatement et tout était dit. Mais autre était le problème quand il s’agissait d’une boîte de viande de conserve, d’un litre de riz ou de haricots octroyé pour seize. Les complications surgissaient et l’on devait alors se former en groupes, ce qui n’avait pas toujours lieu sans trouble, — puis se réunir autour de la détentrice des victuailles.

Celle-ci faisait la distribution avec autant d’impartialité que possible : mais ces efforts, peu appréciés du reste, contentaient rarement tout le monde. Celle qui trouvait sa portion congrue ne manquait pas d’accuser la partageuse de favoritisme ou d’incapacité ; cela parfois donnait lieu à des incidents d’un comique triste, car ils accusaient au fond l’ignoble sordidité du gouvernement à l’égard de ses prisonniers ; il est vrai qu’ayant à solder les conseils de guerre, il se devait à lui-même de faire beaucoup d’économies, au double point de vue du soin de sa réputation de financier et de l’axiome de droit qui veut que les dépens du procès incombent à la partie qui succombe : or, nous ne succombions que trop !

On se figure aisément qu’un litre de haricots