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rons le drapeau rouge, et là nous nous ferons les éducatrices des enfants de la Déportation. »

Singulière perspective, et qui dit bien le caractère de cette excellente fille, enthousiaste jusque dans le malheur.

Cependant je ne pus m’empêcher de sourire à sa proposition. Ne pensant point avoir mérité l’honneur un peu dur d’être déportée, je le lui dis en me séparant d’elle sur l’ordre de la sœur.

Je n’avais point connu Louise Michel à Paris. Aux Chantiers quelques heures suffirent pour faire de nous deux amies.

Une esquisse à larges traits de cette autre Pauline Roland intéressera, croyons-nous, le lecteur.

Le fond de cette âme d’élite est une générosité sans bornes, un détachement des choses qui la touchent, allant jusqu’à l’oubli du moi. Bonne autant qu’on peut l’être, elle s’est fait pour ainsi dire une atmosphère d’abnégation ; elle y respire et s’y meut avec aisance et force, toute sa vie est là, ne pouvoir se dévouer la tuerait ; il lui faut des êtres à chérir, des courages à relever, une confiance enfin que rien n’altère et qui prouve l’exquise droiture de son cœur. On l’aime sans le vouloir, parce qu’elle aime sans compter.