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LE SETUBAL

Aimait-il vraiment sa femme ? Il est loisible d’en douter : peut-être son caprice n’avait pas eu d’autre origine qu’un sentiment de basse envie, provoquée par le dépit de constater, avec tout le monde, la préférence qu’une superbe créature marquait à l’un de ses collègues ; le goût de nuire l’avait excité ; l’entêtement avait fait le reste, aidé par ce besoin de vaincre les résistances et de dominer tout.

Les noces eurent lieu, dès que le comte reçut les papiers officiels qu’il avait réclamés ; en même temps, un congé lui permettait de quitter l’escadre, et de rentrer en Europe, où il emmena la nouvelle comtesse.

Le père avait espéré qu’un changement d’existence, des plaisirs mondains et des honneurs auraient promptement raison d’une amourette ancienne : la jeunesse oublie vite ! Mais doña Mercédès n’oubliait pas plus vite que mon frère : leurs lettres en font foi.

Je possède un coffret rempli de celles que