Page:Haraucourt - La Peur, 1907.djvu/325

Cette page a été validée par deux contributeurs.
301
LES SABOTS DE NOËL

l’animal vivant. Pourquoi ? Pour habituer le néophyte au spectacle de la douleur, et l’aguerrir ! Car on l’a employé, cet argument, et quelques-uns ont osé soutenir que l’éducation médicale comporte des exercices d’endurcissement professionnel ! Eh là ! Monsieur ! c’est un blasphème ! Le médecin s’en va par le monde comme un apôtre de pitié ; sa mission véritable, si elle n’est pas toujours de guérir, est au moins de réconforter, et comment réconfortera-t-il ceux qui souffrent, s’il a tué d’abord la pitié dans son cœur ?

— Cette théorie de l’endurcissement…

— Est soutenue ! Je peux vous citer les textes qui la prêchent, et même les textes où des monomanes prônent la volupté du « bon vivisecteur ».

— Laissez-moi croire que nos étudiants accordent peu de crédit à ces paradoxes sadiques.

— Légion, ceux qui les réprouvent ! Légion plus nombreuse encore, ceux qui s’abstiennent de les mettre en pratique ! J’en sais même qui tiennent pour stériles et barbares les six leçons de physiologie que le programme leur impose. Mais là non plus je