Page:Haraucourt - La Peur, 1907.djvu/268

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
244
LA PEUR

En effet, il me faut maintenant attendre quelque peu, attendre une absence de Blasquez, ou la provoquer si elle tarde trop : car j’ai besoin d’être seul avec mon assassin pendant une bonne heure. J’attendrai. Cette patience est même un plaisir : je m’en délecte, et, tandis que nous causons, que nous rions, je guigne mes trois bombes sur leur planchette, et mes trois cruches dans leur coin : je dis bien « mes trois cruches », puisque nous avions utilisé la quatrième, qui était pleine d’eau.

J’attends deux jours. Il faudrait en finir, pourtant ? Encore deux jours… Enfin, Blasquez nous annonce qu’il est convoqué à une réunion catalaniste, pour le lendemain.

Demain ! Demain ! Ah ! la folle nuit d’insomnie que j’ai faite avec ce mot-là ! L’exquise nuit de certitude ! Et quelle adorable journée, ensuite, avec toutes ces heures qui tournaient au cadran, et que je regardais tourner, en les décomptant par demies et par quarts : lorsqu’elles tintaient au clocher de la cathédrale, j’avais l’obsession d’entendre, dans leur musique prolongée, un rire de Barbara et de Catalina, qui chantonnaient : « C’est pour ce