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LE PRIE-DIEU

fait. J’avais mal dans la poitrine et à l’épaule, chaque fois que je respirais. Toute la nuit, la douleur m’a empêchée de dormir ; j’étais glacée, et je devenais folle, tant j’avais peur de tous ces morts, autour de moi. Je ne veux plus m’en souvenir ! Le matin, j’ai entendu des pas ; j’ai appelé. On ne m’a pas répondu. Je tremblais de fièvre : dans un vase de fleurs, le seul qui ne fût pas brisé, j’ai bu de l’eau. La neige est tombée encore : le vent la soufflait sous la porte. Deux fois, j’ai entendu des pas, mais personne n’a fait attention à moi. Si quelqu’un était venu, j’aurais jeté la clef, pour qu’on m’ouvrît ! J’ai fait une prière et j’ai compris qu’il faudrait mourir là ; au moins je mourais près de Lui. Je ne sais pas comment on m’a retirée… »

Note pour le Parquet de la Seine : « 17 février. La dame veuve Léon Derouville est décédée à la date de ce jour, atteinte de pleurésie ; les auteurs de l’attentat sont activement recherchés. »