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L’AGENDA

25 octobre. — Le médecin me trouve très agité. Il me conseille la campagne. Il en parle à son aise : et mon bureau ?

28 octobre. — Toutes les nuits, je rêve d’assassinats et du petit boucher. Je me réveille en sursaut. Si ce misérable est acquitté, bien sûr il fera comme il a dit. J’aurais dû, au dernier terme, donner congé, afin de déménager en janvier et d’aller habiter dans un autre quartier. Ce serait plus prudent. Même en prison, le petit boucher a peut-être des amis qui me guettent.

2 novembre. — Je suis perdu : le petit boucher s’est échappé. On m’en a montré la nouvelle dans un journal, au bureau. Je me suis trouvé mal. Les camarades me plaignaient beaucoup et s’empressaient autour de moi. Avec un dévouement que je n’aurais pas espéré d’eux, ils m’ont soigné, escorté, ramené chez moi. J’ai des frissons et une grosse fièvre.

3 novembre. — Je suis tout à fait malade de l’émotion que j’ai eue et qui ne me quitte pas. Impossible de dormir : à tout instant j’imagine qu’on force ma serrure. Le médecin m’a mis à la diète. Je fais mon testament.