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Seule, et tordant ses bras lassés d’un long repos,
Elle roule son corps sur le poil blond des peaux.
Elle presse ses poings fermés contre ses tempes.
La voilà, haute et nue, à la lueur des lampes,
Devant le grand miroir qui vit tant de secrets :
Sa grâce qu’elle admire excite ses regrets.
Sous le chatouillement lubrique des mains blanches,
Un frisson vient de naître et court le long des hanches.
Elle a pris ses deux seins dans ses mains :

Elle a pris ses deux seins da— « Ô Vénus !
« Regarde ces beaux fruits d’amour, ces fruits charnus,
« Fermes et veloutés comme une pêche mûre.
« Le teint en est si frais et la forme si pure
« Qu’à moins d’être un profane on craindrait d’y poser
« Un autre attouchement que celui du baiser.
« Lorsque sur eux, le soir, je croise et je ramène
« Mes bras, plus blancs que ceux de l’Héra Leucolène,
« On croit voir, s’enroulant comme les flots du Styx,
« Deux torrents de lait clair sur deux roches d’onyx.
« Ma hanche s’arrondit comme une amphore pleine,
« Et mon ventre, pareil à l’urne de Silène,
« Est dur et lisse, avec le reflet chatoyant
« Des tissus satinés qu’on trame en Orient.