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LA VIE EXTÉRIEURE.

 
Je hais le beau, le vrai, le nu ; je n’aime rien.
Partout, de tout, je suis la constante ennemie
Qui se lève sur vous comme un fouet sur le chien.

Je fais pâlir vos fleurs dans la vierge anémie,
Filles aux yeux bistrés, blêmes adolescents,
Et j’emporte au tombeau votre angoisse endormie.
 
Je stérilise l’âme et torture les sens ;
Je glace tout espoir, je châtre toute envie,
Et le vice hypocrite allume mon encens.

Je trouble et je dissous, j’infirme et je dévie ;
J’appelle le remords dès qu’un cœur a battu,
Et, si je le pouvais, j’étoufferais la vie !

Mon but est la douleur, et mon nom la Vertu.