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MER DE GLACE.

 
Un calme convulsif hérisse le glacier
Qui tord ses pics et ses lames couleur d’acier.

Comme les yeux d’un mort qui s’ouvrent dans la tombe,
Il luit, glauque et vitreux, sous le brouillard qui tombe.

Jamais aucun soleil ne flambe sur sa paix ;
Aucun souffle animant ne court dans l’air épais.

C’est fini de bondir sous le fouet des orages
Et de battre les rocs du débris des naufrages !

C’est fini de jeter de l’écume et du bruit,
De cracher au soleil et d’alarmer la nuit !

Une torpeur funèbre emplit cette nature
Que l’ancien souvenir des tempêtes torture :

Et la neige a versé sa blanche floraison
Sur les crêtes dont l’angle écorche l’horizon…