Semblable au bois qui brûle, au bruit vain des tempêtes,
Aux nuages, aux blés fauchés, semblable aux bêtes,
Je tourne dans la roue immense du destin.
Je vais sans voir : je suis le frère du brin d’herbe ;
Et s’il plaît au zéphyr d’écraser ma superbe,
C’est fini du soir au matin !
Mon corps se renouvelle avec le vent qui passe ;
Je nais et meurs un peu chaque jour, et l’espace
Me tient comme la mer tiendrait un grain de sel.
Je suis la goutte d’eau dans le déluge énorme ;
Je suis un des creusets sans nombre, où se transforme
L’être de l’Être universel.
Et j’ai beau m’épuiser à crier vers les nues :
— « Soleils des cieux profonds, planètes inconnues,
« J’arrive, attendez-moi : car j’étouffe ici-bas ;
« J’ai soumis la matière et ses lois à mon signe ! »
— La terre fait mûrir le raisin dans ma vigne
Et la terre ne m’entend pas.