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LA VIE INTÉRIEURE.
LES BÊTES
à madame m. de lamer
Je voudrais être calme et doux comme les bêtes
Qu’on mène par troupeaux brouter à travers champs.
Tout les aime ; le soir mire l’or des couchants
Dans la limpidité de leurs grands yeux honnêtes.
Balançant d’un air las le bloc lent de leurs têtes,
Sur les pacages plats ou les ravins penchants,
Dans les prés pleins de fleurs, sous les bois pleins de chants,
Elles vaguent, rêvant comme font les poètes.
Quand l’herbe rousse fume au soleil de midi,
Elles vont, l’œil mi-clos et le pas alourdi,
Loin des grillons taquins qui craquent autour d’elles.
Puis graves, étalant leurs gros torses velus,
Elles dorment dans l’ombre où passent des bruits d’ailes…
— Je voudrais être calme et doux : je ne sais plus.