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sur la hauteur d’où l’on apercevait le Merizet, il baissa brusquement la glace, se pencha en dehors, et, tant qu’il put voir, resta.

Elle s’enfonçait dans les arbres, la chère maison ; les dômes verts glissaient sur elle, puis la permettaient, et la reprenaient ; elle se noyait de plus en plus ; le toit seulement, comme une nef rose, surnageait par secondes ; et tout d’un coup il n’y eut plus qu’une haie de noisetiers qui défilaient près du fossé.

Il éclata en longs sanglots.

Georges lui posa son bras sur les épaules, autour du cou, et le pencha sur lui, tendrement ; l’abandonné se prêta sans rien dire, et ses larmes coulaient sur le torse de l’autre, qui se mit à le bercer avec lenteur, avec amour, et le baisa au front en implorant pitié du fond de sa douleur.

Pendant tout le trajet, pas un mot ne fut échangé ; à la gare, Pierre reprit son masque d’insensible ; mais il tremblait en lui.

— Hier, à cette heure, elle était là.

Le pied de l’aimée avait foulé ces dalles ; il n’en retrouverait plus de pareilles ! Il regardait le sol d’un air indifférent.

Ne pourrait-on pas écrire tout un drame fait de regards seuls ?

Quand le train roula, quitta cette patrie, l’unique, — oh, pour jamais ! — quand il s’éloigna de la terre promise, Pierre pensa : « Tout est fini. »

Un voyageur lui chercha querelle au sujet des