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femmes à son image. Que deviendront-elles ? Où vivre, et comment vivre ? Le mensonge est leur seul asile, l’hypocrisie est leur seule arme. Feindre et dissimuler ! Ne le faut-il pas, puisque nous leur demandons tout bas ce que nous leur défendons tout haut, ce qu’elles sont poussées à désirer en secret et contraintes à blâmer en public. Pourquoi ne mentiraient-elles pas, puisqu’il faut qu’elles mentent ? Sont-elles méprisables ? Ceux qui profitent de leurs révoltes les mépriseraient volontiers.

— Parfaitement exact.

Desreynes n’aimait pas que les sots fussent de son avis ; il faillit en changer.

— C’est lâche, voilà tout. Mais, bah ! les femmes auront comme nous le droit de réclamer qu’on ne leur fasse pas un crime de leurs infidélités, lorsqu’elles auront cessé d’en faire une faveur.

Ce philosophe ne manquait jamais d’être séduit par l’attrait d’un paradoxe, et souvent les formules lui faisaient ses opinions, plutôt que ses opinions ne faisaient les formules.

— Amen, dit-il.

Content de lui, il ferma les guillemets : depuis longtemps son approbateur n’écoutait plus :

— Des idées fort intéressantes, cher ami ! Pourquoi ne publiez-vous pas ?

— Parce que ce sont des idées fausses, d’abord ; ensuite, et surtout, parce que la paresse est le premier des arts, et le seul qui les comprenne tous. Au surplus,