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levaient en posant leur éventail, et le baron s’assit au bord d’une douairière.

Desreynes avait engagé la sous-préfète, et la comtesse fut leur « vis-à-vis ». Puis ce furent des polkas et des valses ; les robes s’envolaient dans des tourbillons de lumière. Jeanne, en rencontrant Georges, lui souriait : ses lèvres étaient fort rouges sur ses dents blanches.

La première heure s’écoula ; Pierre ne dansait point ; Desreynes, au milieu de ces visages inconnus, se sentait dans sa propre maison et recevait les gens comme ses hôtes, Merizette l’en remercia.

— Vous ne m’invitez pas, ami ?

Il avait peur un peu ; et lorsque, dans une valse, il l’eut entre ses bras, il crut concevoir qu’il faisait là quelque chose de mal. Elle se serrait contre lui. L’étoile de diamant étincelait sur son épaule : sa chair avait des tons chauds et des courbes douces qu’il voyait se perdre et se rejoindre ; de son corps montait l’odeur d’aucune autre femme ; ses yeux ardaient, et quand elle les élevait vers lui, il se sentait trop proche d’elle. Le rythme se précipita. Jeanne, pressée plus fort contre son cavalier, l’entraîna dans une cadence exaltée. Elle avait fermé les yeux. Accrochée à lui, elle le forçait à tourner ; ils pivotaient vertigineusement, les genoux aux genoux. Il sentait à travers son plastron la chaleur et le battement d’une poitrine de femme ; il étreignit sa danseuse et tourna plus vite ; mais soudain : « Assez ! » dit-il. Ils s’arrêtèrent.