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tion ; il leur dit simplement qu’il avait engagé sa parole de rendre Madras aux Anglais le 15 octobre, et leur posa cette unique question : « Suis-je tenu de remplir ma promesse ? » Naturellement on lui répondit : Oui. Il rentra dans la salle où étaient les membres du conseil et leur fit connaître le résultat de la délibération. L’assemblée se sépara aussitôt.

Dans l’après-midi, Bury, d’Espremenil, Dulaurens, Barthélémy, Bruyère et Paradis se réunirent pour délibérer sur la conduite à tenir. D’Espremenil, sans donner à personne le temps de parler, s’écria qu’il fallait arrêter La Bourdonnais. Tout le monde fut effrayé, et de tous côtés on dit que ce n’était pas praticable. Avec son fougueux bon sens, d’Espremenil soutint énergiquement son dire. Il s’écria que la chose était facile ; qu’avec laide des officiers de Pondichéry, on apaiserait vite l’émotion qui s’élèverait ; qu’au surplus, le soldat détestait La Bourdonnais ; qu’enfin aux maux violents il fallait des remèdes extrêmes. L’énergie de d’Espremenil ne put rien contre l’apathie de ses collègues. Désespéré, il sortit de la salle en laissant tomber ce mot prophétique : « Encore quelques heures, et nous serons les prisonniers d’un traître. »

Cependant La Bourdonnais n’était pas tranquille. Il sentait bien que le conseil de guerre réuni par lui n’était qu’une comédie. Il eut le 2, avec Friel, une conversation qui peint d’une façon saisissante son état moral : « Vous aurez beau faire, lui disait Friel, du moment où le pavillon a été arboré, la place devient subordonnée au gouverneur général. Aussi, en entrant, vous auriez dû faire remettre les clefs, livres, etc., aux commissaires