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passion, l’autre la raison, les relations demeurèrent cordiales pendant quelques jours. Dupleix expliquait à La Bourdonnais ses projets et son but. Déjà établis à l’occident et à l’orient de la péninsule, les Anglais occupaient Bombay, Saint-David, Madras, et par la possession de Calcutta dans le golfe du Bengale enserraient l’Inde ; mais d’immenses distances séparaient ces divers établissements, condamnés à périr isolément et tour à tour si le concours d’une flotte leur faisait défaut.

L’unique préoccupation des Français devait donc être d’anéantir l’escadre ennemie. Pour Dupleix, c’était la base de toutes les opérations à effectuer. Cette destruction opérée, on concentrerait tous les efforts de l’attaque sur Madras. C’était, pour les Français, la plus redoutable des possessions anglaises. Située à quarante-huit heures de marche de Pondichéry, cette ville n’était pas seulement pour notre comptoir une dangereuse rivale dans le trafic, elle donnait à l’Angleterre la facilité d’intervenir dans les affaires du Carnate et le moyen d’y paralyser notre domination. Tant qu’elle aurait un pied sur la côte de Coromandel, la Grande-Bretagne pourrait prendre parti contre nos alliés et élever prétendant contre prétendant. Il fallait donc et à tout prix expulser l’Angleterre de cette forteresse, la meilleure garantie de sa puissance dans l’Inde ; c’était le premier siège à faire. Madras pris, Saint-David devait tomber de soi-même. Ce petit fort, ne pouvant contenir qu’une faible garnison, avait de mauvais remparts ; c’était une bicoque, à la résistance de laquelle personne ne croyait. Qui pouvait alors penser que ces murailles de boue desséchée deviendraient