Dans ces conditions, le premier coup de fusil tiré en Allemagne mettrait le Carnate en feu. Comment l’empêcher ? Par l’intérêt commercial ? Mais pour chaque compagnie, l’intérêt, c’était la destruction de la rivale. Restait l’envoi de La Bourdonnais devant Pondichéry. C’était la seule idée pratique contenue dans les dépêches des directeurs. Mais Dupleix ne savait rien des mouvements du chef d’escadre, dont on lui promettait vaguement le secours. Viendrait-il seulement ?
Dupleix ne peut comprendre un tel oubli des règles les plus élémentaires de gouvernement, et s’irrite devant l’aveuglement des directeurs. Il ne croit pas à la possibilité de conclure le traité qu’on lui impose. Il sait que les Anglais sont prêts, qu’une escadre, sous les ordres du Commodore Barnett, qui croisait dans les mers de Chine, rappelé à l’annonce de la guerre, cingle déjà vers Madras, et que l’ennemi a comme objectif immédiat l’attaque de Pondichéry. Cependant les ordres du conseil de Paris étaient formels. Et puis que faire ? Il se résigna donc, non sans déchirement. Il écrivit à M. Morse, gouverneur de Madras au nom de l’Angleterre, pour lui représenter tous les arguments qui militaient en faveur d’une convention de neutralité ; il allait jusqu’aux supplications. Morse répondait avec hauteur qu’il ne pouvait entamer aucune négociation, et qu’il avait reçu de la couronne l’ordre de traiter la compagnie française en ennemie. Presque en même temps, Dupleix apprenait qu’il ne devait pas compter sur l’escadre de La Bourdonnais ; devant des instructions reçues de Paris, La Bourdonnais venait de ren-