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l’opinion. Dans des mémoires énergiques, éloquents, animés du souffle du génie, il défendait ses actes et ses plans. Il en démontrait la grandeur. Il ne se lassait pas d’opposer aux déclamations de ses ennemis la rapidité et l’étendue de ses conquêtes. Ainsi pendant neuf années il usa dans cette lutte stérile une intelligence et une énergie que le gouvernement eût pu utiliser si précieusement pour le service de la France.

La vie devenait de plus en plus dure pour Dupleix. Il perdait sa femme en novembre 1756. C’était son meilleur ami qui partait, l’ami des heures de doute et de tristesse, la compagne de la conquête et des jours de gloire, la confidente précieuse, la vraie moitié de lui-même. Elle le suppliait en mourant de ne pas abandonner la lutte, tant que justice ne lui serait pas rendue. Elle morte, Dupleix sentit la solitude.

Les embarras d’argent vinrent alors. Dupleix, si économe des deniers publics qu’il allait jusqu’à défendre de tirer dans le port le coup de canon qui le matin et le soir salue le pavillon, dépensait libéralement sa fortune pour soutenir ses amis calomniés comme lui. On le raillait de sa gêne ; on avait la bassesse de lui reprocher sa conduite. Cela le navrait. « On ne se contente pas, écrivait-il, de me jeter dans les plus cruels embarras, en différant l’examen de mon compte et en retenant ce qui m’est dû ; on a la dureté de me les imputer à moi-même, en exagérant les dépenses d’une maison nombreuse ! Qu’il est triste d’avoir à se justifier des maux mêmes qu’on nous cause ! Les personnes logées et nourries dans ma maison sont ou des parents ou des alliés, ou des amis revenus avec moi de l’Inde,