Page:Hamont - Dupleix d’après sa correspondance inédite, 1881.djvu/334

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

francs ; le tout, moins une petite somme, ayant été avancé par lui sur le gage des revenus séquestrés par Godeheu. Jamais revendication ne fut plus juste ; jamais comptes ne furent plus clairs. Aussi ne songea-t-on pas à en discuter les différents articles. Les directeurs, avec une audace incroyable, refusèrent tout simplement de les reconnaître, parce qu’ils n’avaient pas été au préalable apurés par le conseil de Pondichéry, omission due uniquement au refus de Godeheu. Pendant quelque temps, Dupleix continua à se fier aux assurances ministérielles que les directeurs seraient forcés de lui faire justice. »

Rien ne venait pourtant ; on opposait à toutes ses demandes des fins de non-recevoir, comme si on eût voulu le lasser. Il se décida alors à intenter un procès à la Compagnie. Le débat s’agrandit bientôt ; tout en conservant la forme judiciaire, il devint au fond politique. On déchaîna contre lui les libellistes les plus venimeux. On attaqua avec fureur l’administration de Dupleix ; on tourna ses plans en ridicule ; on l’insulta ; on lui reprocha comme un crime personnel la capitulation de Law ; on appela sa constance de l’entêtement, sa fermeté de l’aveuglement. On le représenta comme le plus avide des traitants, et, par une étrange inconséquence, on lui reprocha ses dépenses. On trouva comique sa prétention de dominer l’Inde ; on le traita de rebelle ; on l’accusa presque de trahison.

Au milieu de ce débordement d’injures, en présence de ce déni de justice, Dupleix, s’il sentait l’amertume et la colère lui envahir le cœur, n’était pas découragé. Il luttait avec sa ténacité habituelle pour ramener