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tissée à l’aide de l’argent du rival, et chacun s’arrangeait pour pousser traîtreusement les petits souverains du pays à ruiner l’autre par l’extorsion de taxes écrasantes et soudaines. Une pareille situation et un pareil esprit de part et d’autre n’admettaient pas de compromis possible, et le commerce de l’Inde ne pouvant répondre à la fois aux exigences des deux rivaux, une lutte acharnée était inévitable dans un temps donné. »

Sans que personne pût s’en douter, les deux Compagnies étaient à la veille de subir une transformation complète. Elles tendaient à devenir des puissances politiques. C’était la conséquence obligée de leur constitution même et du caractère des deux nations. Quoique d’une superficie bien faible, quoique entachés de vasselage envers le nabab du Carnate, le territoire et la ville de Pondichéry constituaient en fait un domaine offrant quelque analogie avec un État. Il en était de même à Madras. Enfin et pour comble de similitude, les deux Compagnies avaient à leur solde quelques centaines d’Européens et quelques centaines d’indigènes. Comme qualité, ces troupes étaient d’une infériorité remarquable, Mais elles n’en constituaient pas moins un embryon d’armée. En somme, les deux Compagnies possédaient des institutions qui les conduisaient à négliger le commerce pour la politique. La Société française était déjà légèrement engagée dans cette voie. Le principe d’intervention appliqué par Dumas, le dernier gouverneur, nous avait valu la conquête de Mahé et de Karikal ; des rapports étaient noués avec quelques potentats indiens. La France avait déjà un pied dans les affaires de l’Inde.