Page:Hamont - Dupleix d’après sa correspondance inédite, 1881.djvu/32

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

d’hommes qui avaient fait leur fortune et acquis leurs idées dans des affaires d’agiotage, le conseil, au contraire, apportait dans la direction des choses d’un monde qui lui était absolument inconnu les préoccupations les plus mesquines, les vues les plus étroites. Il refusait de s’occuper de tout ce qui n’était pas d’un ordre purement commercial. Il n’y avait dans cette assemblée aucune énergie, aucune intelligence ; la lâcheté et l’avarice y régnaient seules. On eût offert aux directeurs l’empire de l’Inde, qu’ils auraient refusé avec indignation, s’ils avaient soupçonné qu’il faudrait pendant quelques années abandonner l’espoir des dividendes qui devenaient de plus en plus problématiques pourtant. Et cette assemblée était souveraine ! Elle n’avait aucun contre-poids ; la cour se souciait peu des établissements d’outre-mer. L’opinion était inerte. Les questions coloniales laissaient tout le monde froid.

Les Anglais, eux aussi, avaient fondé une association destinée à assurer un trafic régulier entre la Grande-Bretagne et l’Inde. Ils avaient créé des factoreries à Bombay, à Madras, au fort Saint-David, à Mazulipatam et à Visagapatam. Dédaignant la politique, ils ne s’occupaient en aucune façon des guerres et des révolutions, dont l’Inde était le théâtre ; tout ce qui ne touchait pas directement à leur négoce les laissait indifférents. Entre les deux Compagnies respectives, les rapports étaient difficiles et empreints d’aigreur. On se jalousait. « Le Carnate n’était pas assez vaste pour que la concurrence que s’y faisaient les Français et les Anglais n’amenât pas de continuelles collisions. Les ouvriers tisseurs de l’un étaient encouragés par l’autre à lui livrer l’étoffe