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il pas convenable à son affermissement et à nos intérêts de faire sauter la tête de Saïd-Lasker-Kan ? Un pareil acte de justice ferait le meilleur effet et tiendrait tout dans l’ordre pour l’avenir ; car enfin, avoir près de soi un homme de ce caractère, c’est vouloir être esclave ou malheureux toute sa vie. À de grands maux, il faut de grands remèdes, et c’est le seul et le vrai que je connaisse pour la sûreté du nabab et de nos affaires. » Malheureusement Bussy n’écouta pas ce conseil si sage. Il se contenta de surveiller le musulman.

Saïd-Lasker-Kan trahissait Bussy et le roi son maître. Le ministre était ambitieux et supportait difficilement d’être le second dans les conseils du soubab. Le pouvoir de Bussy lui était odieux. Il voulait expulser les Français du Dékan, pour régner sans partage sur l’esprit de Salabet-Singue ; mais il ne pouvait pas employer la force pour venir à bout de cette œuvre : il eût été brisé d’un seul coup. Il résolut d’arriver à son but par des menées souterraines, à l’aide des moyens que fournissent la perfidie et la ruse. Son plan était de créer sans cesse les difficultés les plus irritantes aux Français, de n’opposer à leurs réclamations que l’inertie, dissimulée sous des paroles doucereuses, de les fatiguer, de les dégoûter afin de les faire partir. Grâce à sa patience et à son astuce d’Asiatique, il avait jusqu’ici mené très-adroitement son complot ; il avait mis, on le sait, Bussy dans un état d’agacement qui lui faisait désirer le retour. Enhardi par le désarroi du général, il s’était adressé au gouverneur de Madras, à Saunders, pour lui demander son appui. Il faisait luire aux yeux de celui-ci la perspective séduisante de