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a trop embrassé, s’écrient-ils ; l’œuvre est surhumaine. » Non ! l’œuvre n’a pas grandi outre mesure, ce sont les instruments qui ont rapetissé.

Dupleix, dont les revers excitaient l’énergie, se hâtait de reconstituer l’armée, pour l’envoyer à de nouveaux combats, lorsqu’il reçut une nouvelle du caractère le plus alarmant : Gasendi-Kan avait envahi le Dékan à la tête d’une armée de plus de cent mille hommes ! Ce coup semblait le renversement des projets et des espérances du gouverneur.

C’était Bussy, qui annonçait la formation de cette nouvelle tempête. Sa lettre peignait la situation sous les couleurs les plus sombres. Il y avait une panique à la cour du soubab. Tout le monde y avait perdu la tête. On suivait avec un effroi indicible les progrès de Gazendi-Kan ; on croyait que rien ne pouvait l’arrêter. On exagérait ses forces et la valeur de ses troupes. L’affolement était général. La résistance semblait une folie. On avait évacué Aurungabad. Salabet-Singue et son entourage ne voyaient plus de salut que dans une retraite immédiate sur Mazulipatam. On se demandait même avec anxiété s’il ne fallait pas s’enfuir jusqu’à Pondichéry.

Bussy partageait ces craintes, et ce qui l’effrayait le plus, c’est que la négociation avec Balladgi-Rao n’était pas terminée. Il était convaincu que le Peishwa et Gazendi-Kan s’allieraient fatalement. Dès lors comment résister aux efforts combinés des deux princes ? Il n’avait plus la confiance et la décision d’autrefois. Il oubliait ses triomphes à Ambour et à Gingy, ses victoires sur les Mahrattes ; le dédain qu’il avait montré jusqu’ici